Notre association a été invitée à Casal di Principe (près de Naples en Italie) sur les terres de l'antimafia dans le cadre d'un voyage organisé par l'association Crim'HALT et financé par Erasmus +. Cette semaine riche d'enseignements nous a permis de toucher du doigt la manière dont l'Italie met en pratique avec succès sa législation antimafia. En voici quelques moments fort
"EN MATIÈRE DE LUTTE ANTIMAFIA, L'ITALIE A 50 ANS D'AVANCE SUR LA FRANCE"
Tels sont les mots du Président de l'association Don Pepe Diana à Casal di principe, bourgade de 20 000 habitants à 20km de Naples et fief historique des Casalesi, les financiers de la Camorra.
L'association Don Pepe Diana a été créée peu après l'assassinat de ce prêtre qui critiquait (ou)vertement la Camorra dans ses prêches et l'a payé de sa vie.
L'association Crim'halt, grâce au financement européen Erasmus +, a convié 30 personnes, entre autres familles de victimes du narcotrafic à Marseille, journalistes et membres des collectifs antimafia en Corse, à participer à une semaine d'étude sur les terres de la lutte antimafia à Casal di Principe où les Casalesi ont été très fortement affaiblis grâce à l'action de citoyens courageux.
Le thème d'étude principal de cette semaine était la restitution à des fins sociales de biens confisqués à la mafia:
La Casa di Don Pepe Diana qui se trouve dans une villa aux allures de temple grec, confisquée à un boss des Casalesi, est un lieu de mémoire où sont affichées des dizaines de photos de victimes de la mafia, mais c'est aussi un lieu de vie où ont lieu des expositions et des événements à la mémoire des victimes, des ateliers éducatifs pour les jeunes ou des réunions de familles de victimes ;
Un restaurant où travaillent des personnes autistes, auparavant "parquées" dans un hôpital psychiatrique et aujourd'hui libres et qui ont un rôle dans la société;
Une coopérative de mozzarella où s'activent ex-détenus et personnes souffrant de handicap mental ou moteur.
Ce ne sont que trois exemples parmi une vingtaine d'autres dans cette région où une cinquantaine de biens ont été confisqués et sont en passe d'être attribués.
Nous avons rencontré, lors de cette semaine d'étude, un spécialiste de l'économie sociale et solidaire et de la mafia qui a clairement exprimé la nécessité d'élargir à toute l'Europe les législations anti-mafia. La mafia ne connaît évidemment pas de frontière et, depuis les lois italiennes antimafia, elle s'exporte dans les autres pays européens, là où la législation n'est pas adaptée à ce type de criminalité et où elle peut étendre plus librement sa pieuvre.
Outre le "coup de poing" qu'ont constitué les murs de portraits de victimes à la Casa di Don Pepe Diana, nous avons eu l'occasion, lors de cette semaine, d'échanger avec l'ami et témoin oculaire de l'assassinat du prêtre, participé à une marche-commémoration des 30 ans de son assassinat ainsi qu'à celle, à Rome, en mémoire des victimes de la mafia et qui a rassemblé près de 100 000 personnes. Nous avons aussi écouté deux collaborateurs de justice nous expliquer leur parcours terrifiant - l'un d'entre eux était un enfant-soldat de la N'dranghetta - et échangé lors de plusieurs ateliers thématiques avec les participants.
Au coeur des discussions, la notion de "victimes innocentes" telles que les nomme l'association Libera - groupement d'associations anti-mafia.
La loi italienne parle quant à elle de vittime delle mafie et établit une série de critères extrêmement stricts ( comme ne pas avoir de lien familial jusqu'au 4e degré avec un membre d'une mafia) qui ouvrent des droits à une indemnisation pour les familles de victimes.
La définition de Libera est moins restrictive et vise à faire adhérer le grand public, ce qui a permis de faire évoluer la législation italienne.
L'association Don Pepe Diana a été créée peu après l'assassinat de ce prêtre qui critiquait (ou)vertement la Camorra dans ses prêches et l'a payé de sa vie.
L'association Crim'halt, grâce au financement européen Erasmus +, a convié 30 personnes, entre autres familles de victimes du narcotrafic à Marseille, journalistes et membres des collectifs antimafia en Corse, à participer à une semaine d'étude sur les terres de la lutte antimafia à Casal di Principe où les Casalesi ont été très fortement affaiblis grâce à l'action de citoyens courageux.
Le thème d'étude principal de cette semaine était la restitution à des fins sociales de biens confisqués à la mafia:
La Casa di Don Pepe Diana qui se trouve dans une villa aux allures de temple grec, confisquée à un boss des Casalesi, est un lieu de mémoire où sont affichées des dizaines de photos de victimes de la mafia, mais c'est aussi un lieu de vie où ont lieu des expositions et des événements à la mémoire des victimes, des ateliers éducatifs pour les jeunes ou des réunions de familles de victimes ;
Un restaurant où travaillent des personnes autistes, auparavant "parquées" dans un hôpital psychiatrique et aujourd'hui libres et qui ont un rôle dans la société;
Une coopérative de mozzarella où s'activent ex-détenus et personnes souffrant de handicap mental ou moteur.
Ce ne sont que trois exemples parmi une vingtaine d'autres dans cette région où une cinquantaine de biens ont été confisqués et sont en passe d'être attribués.
Nous avons rencontré, lors de cette semaine d'étude, un spécialiste de l'économie sociale et solidaire et de la mafia qui a clairement exprimé la nécessité d'élargir à toute l'Europe les législations anti-mafia. La mafia ne connaît évidemment pas de frontière et, depuis les lois italiennes antimafia, elle s'exporte dans les autres pays européens, là où la législation n'est pas adaptée à ce type de criminalité et où elle peut étendre plus librement sa pieuvre.
Outre le "coup de poing" qu'ont constitué les murs de portraits de victimes à la Casa di Don Pepe Diana, nous avons eu l'occasion, lors de cette semaine, d'échanger avec l'ami et témoin oculaire de l'assassinat du prêtre, participé à une marche-commémoration des 30 ans de son assassinat ainsi qu'à celle, à Rome, en mémoire des victimes de la mafia et qui a rassemblé près de 100 000 personnes. Nous avons aussi écouté deux collaborateurs de justice nous expliquer leur parcours terrifiant - l'un d'entre eux était un enfant-soldat de la N'dranghetta - et échangé lors de plusieurs ateliers thématiques avec les participants.
Au coeur des discussions, la notion de "victimes innocentes" telles que les nomme l'association Libera - groupement d'associations anti-mafia.
La loi italienne parle quant à elle de vittime delle mafie et établit une série de critères extrêmement stricts ( comme ne pas avoir de lien familial jusqu'au 4e degré avec un membre d'une mafia) qui ouvrent des droits à une indemnisation pour les familles de victimes.
La définition de Libera est moins restrictive et vise à faire adhérer le grand public, ce qui a permis de faire évoluer la législation italienne.
Les victimes et la législation
Portraits de "victimes innocentes"
Lors des ateliers, nous avons appris qu'en Irlande, l'assassinat de Veronica Guérin, journaliste assassinée par la pègre locale a permis que se créent, en une seule semaine, une loi spécifique antimafia ainsi qu'une agence pour la confiscation des biens. Et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres.
Socayna, jeune étudiante marseillaise de 24 ans qui, assise à sa table de travail, a été tuée d'une balle de Kalachnikov qui a traversé le mur de sa chambre et est venue se loger dans sa joue, est davantage de nature à emporter l'émotion et à mobiliser la population et partant, à convaincre les politiques qu'à criminalité hors norme, il convient de répondre par une législation elle aussi très spécifique.
Certes, il convient d'adapter la législation italienne à la France, mais il n'est plus temps de dire que la mafia italienne n'a rien à voir avec la française. La seule différence entre les deux réside dans les rites d'adhésion ou l'appartenance familiale, plus rarement présents chez nous. Hormis cela, les éléments de porosité économique, de corruption et surtout d'usage indiscriminé de la violence sont bel et bien là.
Socayna, jeune étudiante marseillaise de 24 ans qui, assise à sa table de travail, a été tuée d'une balle de Kalachnikov qui a traversé le mur de sa chambre et est venue se loger dans sa joue, est davantage de nature à emporter l'émotion et à mobiliser la population et partant, à convaincre les politiques qu'à criminalité hors norme, il convient de répondre par une législation elle aussi très spécifique.
Certes, il convient d'adapter la législation italienne à la France, mais il n'est plus temps de dire que la mafia italienne n'a rien à voir avec la française. La seule différence entre les deux réside dans les rites d'adhésion ou l'appartenance familiale, plus rarement présents chez nous. Hormis cela, les éléments de porosité économique, de corruption et surtout d'usage indiscriminé de la violence sont bel et bien là.
L'avenir en Corse et au plan national
Le travail entamé en 2023 dans le cadre des ateliers mis en place par la CdC à la demande des collectifs antimafia va se poursuivre dans l'action. Nous attendons de la synthèse de l'exécutif de la CdC des pistes d'actions concrètes, dans la foulée de ces ateliers de 2023. Le collectif Maffia No, A Vita Iè sera partie prenante de ces actions.
Au plan national, les actions de plaidoyer auprès des députés doivent également se poursuivre. Puisse l'exemple italien opérationnalisé depuis des dizaines d'années se concrétiser rapidement chez nous.
Les choses avancent, mais il nous faut accélérer le pas si nous ne voulons pas qu'il y ait encore des Socayna dans 50 ans.
Au plan national, les actions de plaidoyer auprès des députés doivent également se poursuivre. Puisse l'exemple italien opérationnalisé depuis des dizaines d'années se concrétiser rapidement chez nous.
Les choses avancent, mais il nous faut accélérer le pas si nous ne voulons pas qu'il y ait encore des Socayna dans 50 ans.